Manifestations spontanées dimanche dernier. Textos reçus et renvoyés – rassemblement à Bellecour. Je descends du train et vais poser mon sac avant de les rejoindre. Quand j’arrive il y a un millier de personnes rassemblées, des jeunes, arabes et militants d’extrême gauche surtout. Le cortège repart, veut quitter la place pour en rejoindre une autre. Une cinquantaine de personnes prennent la rue, laissant les CRS sur leur droite. Dans la rue, il y a des barrières faciles à contourner. Quand j’arrive au début de la rue, les premières lacrymos sont lancées. Je regarde autour de moi, je cherche ce qui a pu provoquer ça. Pour l’instant, la manifestation a été très calme. Quelques slogans, pas de casse. Pourtant les lacrymos continuent. Des manifestants cherchent de quoi répliquer mais sur cette place, il n’y a vraiment rien qu’on puisse jeter. Alors les insultes fusent et ils restent devant à faire face. Certains sont venus là pour ça, ils sortent les lunettes de plongée et se couvrent le visage. Beaucoup mettent des capuches sur leur tête. Je continue la manifestation mais ça se disperse et hésite. Certains veulent continuer et continuent, d’autres restent sur Bellecour face aux CRS, d’autres y retournent, d’autres en partent en courant à chaque nouvelle salve de lacrymos. Des voitures de flics, en civils ou pas, arrivent de tout coté. Quand on veut retourner sur Bellecour, il faut faire un gros détour pour les éviter et éviter les manifestants qui courent et qui se demandent ce qu’il se passe. Sur la place, je vois quelques poubelles en train de brûler, les flics ont gagné du terrain, bloquent plusieurs rues environnantes et tirent des flashballs sur ceux qui s’approchent trop. Les lacrymos pleuvent toujours au milieu de la foule. Qu’ils continuent à danser. Je tombe sur des musiciens, accordéon et guitares jouent. Quelques filles dansent. Le bruit sourd des flashballs fait office de grosse caisse, pas vraiment en rythme mais on fera avec. Les manifestants dansent et les CRS tirent. Ils gagnent du terrain, chargent, se replient un peu et chargent à nouveau, les danseurs aussi doivent partir en courant. Plus de la moitié des rues entourant le place sont bloquées désormais. Sur 3 cotés sur 4, je vois des CRS en train de courir. J’entends une vitrine qui casse et une alarme qui se déclenche, des CRS arrivent en courant. Je pars avec ma sœur, on prend une des dernières rues vides de CRS pour rentrer chez elle. On croise un arabe, 35 ans, 110 kg, assis par terre qui pleure. Une flashball dans chaque genou, à 5 mètres. On dirait un cratère dans sa jambe. On l’aide à marcher, on veut le ramener en voiture chez lui, il refuse. On l’amène à Perrache où il doit retrouver des amis qui le ramèneront chez lui. Il n’est pas français mais son fils l’est. Il travaille comme maçon et ne veut pas travailler plus, il veut pouvoir profiter de sa famille de temps en temps.
Demain les journaux parleront d’émeutiers et de casseurs maîtrisés par la police. Les premières peines vont tomber, entre 3 et 6 mois fermes. Bienvenue dans la France d’après. Mais les jeunes n’oublieront pas de danser.
The Kinks – "Don’t forget to dance