Saturday, August 25, 2007

Socialisme et Barbarie

Ici, en Argentine, beaucoup de gens m’envient parce que je suis français. Pourquoi ? Vous avez vu notre président ? réponds-je alors. Oui c’est vrai, mais vous avez de la chance, vous avez des impôts, vous avez des retraites, des indemnisations pour les chômeurs, une sécurité sociale, m’explique-t’on.

Pour eux, ça serait un progrès, pas un retour en arrière. Disons le encore une fois, revenir à la loi du plus fort n’est pas la conséquence directe d’une adaptation nécessaire à la modernité. Non, c’est un choix politique.

Tout ça est vrai : on m’a dit textuellement qu’on avait de la chance d’avoir des impôts, d’être dans un pays de gauche même si le président est de droite.

Parce que si Kirchner est officiellement de gauche (comme on le dit en France en tout cas), personne ici ne le croit. Ses mesures gauchistes ne seraient que de l’achat de voix, du populisme. Son seul côté réellement de gauche serait son opposition au FMI et aux USA.

Alors quand on leur dit qu’un socialiste français est candidat ) la présidence du FMI, ils déchantent.
Une petite question en passant : qui a dit « Un homme de gauche ne peut pas présider le FMI. » ?
Vous ne voyez pas ? trop de possibilités, un cocu de l’UMP ? Mélenchon ou Emmanuelli ? un gauchiste ?

Non. C’est Joseph Tosovsky, ancien directeur de la Banque Centrale Tchèque, également candidat à la présidence du FMI, soutenu par Poutine. (ça vaut pas la Chine dont notre cher DSK est si fier d’avoir obtenu le soutien).

Non, mais franchement, c’est bas de dire ça. Regardez son camarade socialiste Pascal Lamy se débrouille très bien à la tête de l’OMC. Et puis d’abord, depuis quand il se permet de dire que DSK est de gauche ? Même Sarkozy ne ment pas aussi affrontement (si ? ah bon d’accord)

Mais revenons à cette phrase : : « Un homme de gauche ne peut pas présider le FMI. »

Pourtant, dans la séparation droite/gauche actuelle, son créateur JM Keynes est considéré de gauche. Pas par ceux qui sont vraiment à gauche bien sur, mais par beaucoup de gens tout de même (qui ne savent pas qui est Keynes). Car Keynes est capitaliste, interventionniste peut être, mais capitaliste.

Et on ne peut pas être capitaliste et se dire de gauche.

Il faut, au moins, être socialiste. C’est à dire communiste non révolutionnaire, un peu comme la Ligue Communiste Révolutionnaire aujourd’hui.Même si passer du communisme au socialisme a été une belle connerie.

Citation approximative de Rosa Luxembourg : « en changeant le moyen, on change le but. »

Et c’est vrai, car on est ensuite passé du socialisme à un capitalisme étatiste et interventionniste et de là à la social-démocratie.

Et du coup, on considère Keynes de gauche.

Ça craint.

Alors pour revenir à la phrase de l’homme de Poutine : un homme de gauche, dans leur acceptation du mot, peut diriger le FMI. Il pourrait peut être même faire quelque chose de bien. Mais ne rêvons pas, Strauss-Kahn ne cesse de répéter qu’il faut redéfinir les missions du FMI. De la même manière qu’on a redéfini le socialisme ? toujours plus à droite ?

Répétons ce qui devrait être le seul leitmotiv de la gauche, quelque soit le pays : lynchons le propriétaire.

Dead Kennedys - Let's Lynch The Landlord

9 comments:

Berlin Belleville said...

Ou alors ne question médiatique. On répète (d'ailleurs je me demande pourquoi) partout à la télé que le PS est de gauche, alors TOUS ses membres deviennent de gauche, c'est le magnifique résultat de cette superbe campagne présidentielle : la "Gauche" vs la Droite...
... Et comme pour beaucoup de monde, l'information principale se situe sur la première chaine et que les dirigeants le savent, ils adoptent ce langage grossier, caricatural, et simpliste... (cf. 6 mai 2007)

vlg said...

hu hu je viens de découvrir ton blog via ton commentaire sur VLG. J'ai beaucoup aimé ton "C’est à dire communiste non révolutionnaire, un peu comme la Ligue Communiste Révolutionnaire aujourd’hui.".

Tu devrait le poster chez l'ami CSP, je suis sur qu'il appréciera beaucoup.

Baldassare Castiglione said...

En France (je pense que ce n'est pas mieux en Allemagne, en Espagne ou en GB, entre autres), dans le vocabulaire des partis à vocation gouvernementale, la "modernisation" s'est depuis longtemps substituée au "progrès"...
Dans ces mêmes discours, la "modernisation" est toujours présentée comme "nécessaire", associée à la notion de "mouvement", opposée à "l'archaïsme" et à "l'immobilisme" des autres... Les "acquis sociaux" deviennent des "privilèges"...
Langage pervers, qui nous fait effectivement oublier qu'il y a dans le monde pas mal de gens qui envient nos "archaïsmes" et nos "privilèges"...

Bernard Black said...

Je sais, c’était un peu de la provoc aussi. Mais c’est le paradoxe de la LCR qui est composé de militants révolutionnaires mais qui présente un vrai programme aux élections basés sur la défense du service public et l’augmentation des bas salaires notamment, ce qui n’est pas vraiment communiste révolutionnaire. Ils disent aussi faire une candidature de témoignage et ne pas vouloir du pouvoir, et là aussi c’est contradictoire avec leur revendications au moment des élections.

Mais bon si j’étais en France, je m’impliquerai dans le projet de nouveau parti, ce que je ferai sans doute à mon retour d’ailleurs (même si il y a un an, je refusais absolument d’aller dans un parti)

@baldassore : si tu ne l'as pas deja lu, lis "lqr, la propagande au quotidien" d'eric hazan sur la novlangue neoliberale et les detournement de sens et l'essorage sémantique que ça entraine

Baldassare Castiglione said...

Je l'ai lu, et malheureusement je n'ai de cesse de constater sa pertinence, de lui trouver des illustrations (le pire étant que le PS adopte maintenant sans vergogne ce langage auquel - s'il prétendait être une organisation de gauche - il devrait s'attaquer)...

PS : j'envisage également, s'il se crée, de m'impliquer dans ce projet de "nouveau parti"...

Your Dog said...

Assez d'accord dans l'ensemble, en Colombie c'est pareil d'ailleurs ; on reproche à Sarko de casser le modèle français qui est perçu comme une chance, et d'être pote avec un Uribe de moins en moins populaire (décidément, après Bush, il se tape tous les pestiférés de la terre le père Sarko).

Cela dit, je suis trop libertaire pour me dire de gauche, mais quand tu expliques que la politique du struggle for life n'est pas une "adaptation nécessaire" etc mais bel et bien et bien un choix, j'adhère à 100 % ;)

Anonymous said...

Non, rien, c'était juste pour dire que j'allais regarder d'un peu plus près ce joli blogue de quelqu'un qui vient citer le love poem de Brautigan chez nous que, du coup, on a (re)posté.

L'Anonyme de Chateau Rouge said...

Bon bah je suis content, rien a dire de plus que la note de Bernard que ce qui a été dit par les commentateurs.
sauf que j'ajouterais que ma nouvelle note (he oui, enfin!) est pile poile dans le sujet.

allez hop,

joyeuse révolution a tous !

West Coon Rapids Office Cleaning said...

This is aweesome